Ces derniers mois, l’hydrogène a pris son envol avec la multiplication de projets industriels et de plans gouvernementaux. Mais il s’agit encore largement de l’hydrogène vert, produit industriellement, alors que sa forme naturelle, moins coûteuse et totalement propre, attend toujours d’être pleinement exploitée.
Pour réussir sa transition écologique, la planète entière mise de plus en plus sur l’hydrogène, un carburant réputé vertueux. En 2020, plusieurs gouvernements ont présenté des plans hydrogène, dont l’Allemagne qui a mis sur la table 9 milliards d’euros pour devenir numéro Un de cette ressource. La France aussi a promis investir plus de 7 milliards d’euros sur dix ans pour en démocratiser l’usage. Pour piloter cette grande transformation, elle a créé en janvier 2021 un Conseil national de l’hydrogène piloté par les patrons des grandes entreprises de l’énergie (Total, Air Liquide, Engie, etc.). Ces grands groupes ont eux aussi lancé leurs projets hydrogène afin de réaliser leur propre transition. Total et Air Liquide, notamment, sont très actifs sur ce volet.
Les plans et projets actuels misent sur l’hydrogène vert produit à partir d’électricité issue de sources renouvelables. Cette ressource se distingue de l’hydrogène jaune, qui provient des réacteurs nucléaires, peu émetteurs de CO2 et de l’hydrogène bleu produit par reformage de gaz fossile dont on tente ensuite de capturer les émissions de carbone pour les réutiliser de manière éco-responsable. A ces formes, il faut ajouter l’hydrogène turquoise à base de méthane avec stockage du carbone de façon pérenne et l’hydrogène gris issu d’énergies fossiles (le méthane, le pétrole, le charbon, etc.) et donc très pollueur.
Beaucoup d’électricité et d’eau…
S’il est meilleur que les autres, l’hydrogène vert présente toutefois un gros inconvénient. Il faut beaucoup d’électricité pour le produire à grande échelle. Selon une équipe de chercheurs sollicitée par Reporterre, un quotidien pour l’écologie, il faudrait 92,4 TWh/an (térawattheures par an), soit quinze réacteurs nucléaires ou 910 km² de panneaux solaires pour alimenter cent mille camions de plus de seize tonnes parcourant une moyenne de 160.000 km/an. Cela implique donc de raser des milliers d’hectares de forêts en France ou de gaspiller énormément d’eau.
Face à ces enjeux écologiques (et même techniques et financiers), il serait judicieux d’avoir enfin le courage et la volonté nécessaire pour se tourner enfin vers l’hydrogène naturel. Contrairement à ce qui se dit dans certains milieux scientifiques, cet hydrogène natif se trouve partout dans le monde et en grande quantité. Les géophysiciens français Alain Prinzhofer et Eric Derville ont prouvé dans leur retentissant ouvrage « L’Hydrogène naturel : la prochaine révolution énergétique ? », paru en 2010, qu’il existe d’importantes réserves de ce gaz dans plusieurs pays. Parmi eux le Canada, l’Australie, la Russie, le Brésil, les Etats Unis, le Mali et même la France.
Hydroma, pionnier de l’hydrogène naturel
Alors que les autres pays restent frileux, invoquant les obstacles technologiques et financiers, les Etats Unis et le Mali ont déjà commencé l’exploitation de l’hydrogène naturel depuis 2012. Le premier dans le Kansas et le deuxième dans le cercle de Kati. Mais c’est le Mali qui a une bonne avancée dans cette filière grâce à Hydroma, une compagnie créée par le milliardaire malien Aliou Boubacar Diallo. Depuis huit ans, Hydroma transforme l’hydrogène naturel en électricité verte près du village de Bourakébougou, où elle a installé une unité pilote. L’entreprise a prouvé que cette ressource est totalement vertueuse : abondante, renouvelable, moins chère et surtout n’émet aucun CO2. Elle a récemment lancé une production à grande échelle pour approvisionner tout le Mali, puis l’Afrique et l’Europe. Pour cela, Hydroma prévoit la construction d’un pipeline de 4.700 kilomètres du Bourakébougou jusqu’aux portes du Vieux continent.
L’Allemagne prête une attention particulière à Hydroma
Par parallèlement, la compagnie continue ses forages (déjà 25 puits positifs découverts) au Mali et débute des prospections en Australie et au Canada, où se trouve son siège social. Le Canada, qui a récemment annoncé une stratégie de l’hydrogène, pourrait donc profiter de l’expertise d’Hydroma dans ce secteur pour devenir numéro Un de l’hydrogène naturel. Un statut que convoite aussi l’Allemagne déjà très intéressée par les travaux de la société d’Aliou Diallo. La première économie européenne a invité le PDG malien en septembre 2020 pour en savoir davantage sur sa révolution énergétique. Elle compte se servir des connaissances d’Hydroma dans son plan hydrogène.