L’Europe au défi de l’équation insoluble des PFAS

Une nouvelle enquête journalistique lève le voile sur le défi que représente pour le vieux Continent, l’éradication des polluants dits éternels de l’environnement.

L’étude récemment consacrée aux substances per- et polyfluoroalkylées communément appelées PFAS met le doigt sur l’engrenage environnemental sans fin représenté par cette de famille de plus de 10 000 composés chimiques synthétiques encore connus sous l’appellation de polluants éternels.

Particulièrement appréciés par le secteur industriel pour leurs diverses propriétés (résistance à l’eau, à la chaleur et aux graisses, caractère antiadhésif et déperlant, entre autres), ils se révèlent problématiques précisément à cause de ces mêmes caractéristiques objet de leur succès.

Cela les rend en effet presque indestructibles dans la nature. De quoi provoquer des dommages dont l’ampleur reste d’ailleurs insoupçonnée, pour la santé (cancers, infertilité, contamination du foie et des reins, perturbation du système immunitaire, etc.).

Leur présence dans l’eau, l’air ou les sols est tout aussi dangereuse par la planète. D’où l’urgence nécessité de se débarrasser de ces contaminants d’un autre type. Un chantier titanesque que l’enquête baptisée Forever Pollution Project, tente pour la première fois d’évaluer dans le cadre de l’Union européenne.

Une facture vertigineuse

Le travail qui met en exergue 46 journalistes et 29 partenaires médias dans 16 pays différents, situe le coût de la dépollution au sein de l’espace européen entre 95 et 2000 milliards d’euros sur vingt ans, la fourchette haute étant considérée comme la plus réaliste.

Selon Le Monde, membre du consortium de médias à l’origine de l’étude, cette estimation n’inclut même pas l’impact sur les systèmes de santé ni de nombreuses autres externalités négatives difficiles à quantifier. La raison de cette facture vertigineuse ? Une concentration explosive de PFAS dans la zone concernée.

C’est que le continent européen est particulièrement touché, avec au moins 23 000 sites pollués confirmés et presque autant de sites fortement suspects, à en croire une précédente enquête publiée en 2023 par le même Forever Pollution Project.

Et pourtant, ce chiffre rapporté annuellement et à débourser « à perpétuité » jusqu’à l’instauration d’une interdiction totale des PFAS, représente déjà d’après Le Monde, plus de la moitié du budget de l’UE sur la même période.

Une bataille logistique complexe

Au-delà de l’ardoise financière, la décontamination de ces substances pose également des défis technologiques colossaux, selon l’enquête. D’autant que les méthodes traditionnelles de traitement de l’eau, comme le charbon actif, s’avèrent insuffisantes face à certains PFAS, particulièrement les composés dits à chaîne courte.

Par ailleurs, la destruction des PFAS exige des températures supérieures à 1050°C, bien au-delà des capacités des incinérateurs conventionnels. « Il n’y a pas assez d’argent sur terre pour retirer les PFAS de l’environnement aussi vite que nous les y émettons actuellement« , affirme dans les colonnes du Monde, la chercheuse Ali Ling.

Les experts interrogés par le journal suggèrent donc de donner la priorité aux sites présentant les risques les plus élevés pour la santé humaine, à défaut d’abandonner complètement ces substances.

Car estime Hans Peter Arp, coordinateur du projet de recherche européen ZeroPM, « il nous reviendra toujours moins cher de cesser d’émettre des PFAS que de décontaminer« .

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