Au Nigeria, le combat des communautés contre Shell s’invite à Londres

Des membres de la communauté nigériane du delta du Niger en appellent à la responsabilité de la firme pétrogazière dans le scandale de pollution de leur région, alors que s’ouvre dans la capitale britannique une audience préliminaire sur le sujet.

Au Nigeria, le ressentiment envers Shell est à son paroxysme. Notamment dans les communautés d’Ogale et de Bille, toutes deux régions sitées au sein du dela du Niger, le principal centre de l’industrie pétrolière du pays d’Afrique de l’Ouest.

En témoigne le cri du cœur lancé, jeudi 13 février à Londres, par le chef communautaire Godwin Bebe Okpabi, en marge de l’ouverture à la Haute Cour de Londres, d’une audience préliminaire censée évoquer la responsabilité de la major pétrogazière néerlando-britannique dans un scandale tentaculaire ayant eu lieu sur le sol nigérian.

Il s’agit du déversement de plusieurs millions de barils de pétrole brut entre 1989 et 2020 par la Shell Petroleum Development Company of Nigeria (SPDC), filiale nigériane de Shell, dans les régions citées plus haut, avec des conséquences dévastatrices dont les effets sont toujours ressentis sur place.

Entre désespoir et détermination

La marée noire a ainsi rendu les eaux inutilisables, avec une destruction massive des mangroves ; les sols ont été contaminés sur plusieurs mètres de profondeur ; les populations sont également sujettes à de graves problèmes de santé…

« En ce moment même, des gens meurent à Ogale« , a déclaré Godwin Bebe Okpabi à Reuters, en résonance à la tragédie qui se joue quotidiennement dans cette localité du delta du Niger.

Le chef local a notamment dénoncé les méthodes dilatoires de Shell alors que les plaignants cherchent à obtenir justice depuis plus d’une décennie. L’audience de quatre semaines ouverte jeudi n’étant qu’une étape préliminaire avant le procès proprement dit prévu en 2026.

Il vise à déterminer si la SPDC peut être légalement tenue responsable des déversements, alors que la maison-mère de cette filiale met en avant la complexité d’une région – celle du delta du Niger – troublée par le sabotage et le vol de pétrole.

Une affaire aux implications mondiales

L’entreprise, tout en reconnaissant son obligation d’indemniser les victimes de fuites accidentelles, pointe du doigt les « actes malveillants de tiers » comme principale cause des déversements incriminés.

Un problème que l’audience n’est pas près de résoudre d’après un porte-parole du groupe pétrolier cité par Reuters. Un tel argument ne convainc pas les communautés locales, pour qui la responsabilité de Shell est évidente, qu’il s’agisse de prévenir les fuites ou d’en atténuer les conséquences.

D’autant qu’une enquête de la BBC a également mise au goût du jour qu’une opération de dépollution orchestrée par les autorités nigérianes et Shell était en proie à la corruption.

Ce procès pourrait établir de nouveaux standards en matière de responsabilité environnementale des multinationales et influencer la manière dont les entreprises opèrent dans les pays en développement.

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